Tuesday, January 25, 2011

Souvenirs

Je me revois dans ce patelin de 500 habitants il y a 70 ans ; j’avais 10 ans. L’appartement avait un séjour, la chambre des parents et une chambre « noire » où nous dormions mon frère et moi, le long du couloir d’entrée. Une petite fenêtre donnant sur le carrefour en T et il y avait les deux armoires à glace dans la chambre, précieux objets pleins de linge. A gauche de la fenêtre une « pierre à eau » sans eau. Pour avoir de l’eau il fallait descendre l’étage et traverser la rue jusqu’à une borne d’incendie. Il y avait d’autres pièces au même niveau, sans personne et en haut le grenier avec trois pièces vides. Les maisons n’étaient pas chères, il suffisait de les réparer en tant que maçon et menuisier de bricolage. Douche et bain étaient inconnus. Etait-ce le Moyen Age ? Ma mère en 1941 vivait de quoi ? Quelques sous du Gouvernement pour un soldat de deuxième classe fait prisonnier en Allemagne à Potsdam près du château de « Sans Souci ». Bizarrement je revois tous les détails du lieu. La route toute droite en face de la fenêtre passait devant deux fermes : les Stémaaard et les Pataaard. Elle était pleine de purin et de déchets de vaches. C’était l’ambiance normale, pas de voitures à essence, quelques chariots. Nous crevions de faim, les paysans chez qui nous pouvions avoir du lait en payant parmi les mouches mangeaient bien mais nous sans argent nous n’avions même pas un œuf. Heureusement il y avait le grand père à 3 kilomètres à pied. Il se débrouillait assez bien. Je me souviens de m’être baissé pour prendre un bonbon : c’est une crotte de pigeon !
Le père est revenu trois ans après, c’était toujours la guerre mais il avait le droit de travailler à l’usine (10 km à vélo) pour extraire le fer à canon et enrichir les de WENDEL. La première nuit il a dormi par terre, faute d’habitude avec un matelas ; je ne le connaissais plus ; il m’a déçu et j’en ai eu du remords.
Pourquoi les voir maintenant après tout ce temps ? Mauvais présage sans doute. Ils sont tous morts, je ne pense jamais à eux, ils sont en moi. C’est du passé, pas même poétique.
Certains pleurent le temps heureux de leur enfance, je suis à l’abri de ce type de regret. C’est ce qui m’a donné toujours l’envie d’aller de l’avant et d’être responsable de mes actes. Je ne regrette pas du tout mon enfance et contrairement à certains, remplis de complexes, je n’ai aucun reproche à faire à mes parents.
Il est temps de refermer l’armoire à souvenirs et d’oublier. M.Th.14.1.11

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